Librairie
Le Temps d'un Livre
« Ce qu’est un roman ? avant tout, c’est une quantité de temps. Quand vous voyez un roman dans une librairie, si vous êtes un peu attentif, vous pouvez évaluer immédiatement la quantité de temps qu’il contient. Et cela dans un double sens : le temps qui a été nécessaire à l’auteur pour l’écrire et le temps qu’il faudra pour le lire. »
- Matéi Visniec, Le Marchand de premières phrases (trad. du roumain par Laure Hinckel)
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Emma Siniavski
Babouchka & Dedouchkasurvivre et s'amuser au pays des soviets
(Sarbacane) 124 pages
« En 2020, je décide de me plonger dans les archives de mon grand-père. Des milliers de lettres, blocs-notes, photographies, revues de presse et brouillons. En fouillant dans tout ce bric-à-brac, je vois pour la première fois son écriture – des pattes de mouche. »
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Vous aviez aimé Les Services compétents, l’excellent roman de Iegor Gran sur son père le dissident Andreï Siniavski ? alors vous allez adorer – enfin… il y a de forte chance – cette merveilleuse bande dessinée créée par la petite fille de Siniavski (et fille de Gran) : Emma. D’un trait léger, elle esquisse avec la naïveté d’une enfant (mais la maîtrise d'une adulte) le destin peu commun de son grand-père (qui écrira le livre Promenade avec Pouchkine au Goulag) ; mais aussi de sa grand-mère Maria, qui fit construire une pièce cachée dans leur appartement pour y ranger les livres interdits en Russie soviétique ; de leur amour (la grand-mère fut en concurrence avec la fille même de Staline !) et de leur résistance au KGB ; sans oublier le retour du goulag, leur exil en France, et... incroyable : cette planche de bois qui servait de porte de porcherie, que Maria repère lors d’un des nombreux voyages du couple dans les régions de Russie délaissée par les politiques en place, planche que Maria emporte, nettoie, pour trouver une icone du XIXe, puis nettoie à nouveau, encore et encore, passant du XVIII au XVII et finalement révéler une incroyable peinture du XVe représentant Saint Georges terrassant le dragon – icone que le couple offrira British Museum et qui est encore visible aujourd’hui. Ce livre est étonnant voir renversant, touchant, très informatif et pour ne rien gâcher, le dessin tout en délicatesse d’Emma Siniavski fait de cette bande dessinée un véritable ravissement pour les yeux et la tête. Quelle belle surprise.
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Vous aviez aimé Les Services compétents, l’excellent roman de Iegor Gran sur son père le dissident Andreï Siniavski ? alors vous allez adorer – enfin… il y a de forte chance – cette merveilleuse bande dessinée créée par la petite fille de Siniavski (et fille de Gran) : Emma. D’un trait léger, elle esquisse avec la naïveté d’une enfant (mais la maîtrise d'une adulte) le destin peu commun de son grand-père (qui écrira le livre Promenade avec Pouchkine au Goulag) ; mais aussi de sa grand-mère Maria, qui fit construire une pièce cachée dans leur appartement pour y ranger les livres interdits en Russie soviétique ; de leur amour (la grand-mère fut en concurrence avec la fille même de Staline !) et de leur résistance au KGB ; sans oublier le retour du goulag, leur exil en France, et... incroyable : cette planche de bois qui servait de porte de porcherie, que Maria repère lors d’un des nombreux voyages du couple dans les régions de Russie délaissée par les politiques en place, planche que Maria emporte, nettoie, pour trouver une icone du XIXe, puis nettoie à nouveau, encore et encore, passant du XVIII au XVII et finalement révéler une incroyable peinture du XVe représentant Saint Georges terrassant le dragon – icone que le couple offrira British Museum et qui est encore visible aujourd’hui. Ce livre est étonnant voir renversant, touchant, très informatif et pour ne rien gâcher, le dessin tout en délicatesse d’Emma Siniavski fait de cette bande dessinée un véritable ravissement pour les yeux et la tête. Quelle belle surprise.
©Yann Courtiau 2025

Kevin Cummins
Mixing Memory & Desire(Cassell) 256 pages
« Kevin’s photographs of Bowie anaesthetize time. Each frame allows then and now to merge. Memories can fall into the image and Bowie stays just as he always was. (Gail Crowther)
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On doit à Kevin Cummins l’une des plus belles photographies de Ian Curtis, le regard qui plonge directement dans le vôtre, la main portant une cigarette à sa bouche, les épaules resserrées, le manteau, il fait froid… c’est la pose définitive et c’est de cette façon que, la plupart d’entre nous sans doute, nous sommes représenté le chanteur de Joy Division. On oublie pourtant que Kevin Cummins n’a pas photographié QUE Joy Division, mais aussi les Stone Roses, Björk ou encore The Fall, pour ne citer que ceux-là, et on lui doit aussi de belles images de l’émergence du punk à Manchester et de l’après. Et puis on oublie aussi qu’il a grandi avec la musique de David Bowie, le photographiant à divers moments de sa carrière, d’abord en 1972 lors d’un concert à Manchester, ainsi qu’en 1977 lorsque Bowie joue pour et dans l’ombre d’Iggy Pop - qu’il accompagne en tournée pour la promotion de The Idiot. Cummins finit par rencontrer Bowie en 1991 lors d’une session photographique et il avoue avoir été aussi nerveux que lorsqu’il avait quinze et qu’il découvrait Space Oddity pour la première fois! Puis viennent les clichés de Londres en 1995 – bouleversants – et ceux de New York quelques années plus tard alors que Bowie et Cummins deviennent confidents. On tient là beau livre de photographies, accompagnés de petites textes de Kevin Cummins, pour expliquer le contexte, ainsi qu'une magnifique postface de la chercheuse et écrivaine Gail Crowther qui, pour vous donner le ton, a récemment écrit sur Sylvia Plath et Anne Sexton. Merveille. ©Yann Courtiau 2024
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On doit à Kevin Cummins l’une des plus belles photographies de Ian Curtis, le regard qui plonge directement dans le vôtre, la main portant une cigarette à sa bouche, les épaules resserrées, le manteau, il fait froid… c’est la pose définitive et c’est de cette façon que, la plupart d’entre nous sans doute, nous sommes représenté le chanteur de Joy Division. On oublie pourtant que Kevin Cummins n’a pas photographié QUE Joy Division, mais aussi les Stone Roses, Björk ou encore The Fall, pour ne citer que ceux-là, et on lui doit aussi de belles images de l’émergence du punk à Manchester et de l’après. Et puis on oublie aussi qu’il a grandi avec la musique de David Bowie, le photographiant à divers moments de sa carrière, d’abord en 1972 lors d’un concert à Manchester, ainsi qu’en 1977 lorsque Bowie joue pour et dans l’ombre d’Iggy Pop - qu’il accompagne en tournée pour la promotion de The Idiot. Cummins finit par rencontrer Bowie en 1991 lors d’une session photographique et il avoue avoir été aussi nerveux que lorsqu’il avait quinze et qu’il découvrait Space Oddity pour la première fois! Puis viennent les clichés de Londres en 1995 – bouleversants – et ceux de New York quelques années plus tard alors que Bowie et Cummins deviennent confidents. On tient là beau livre de photographies, accompagnés de petites textes de Kevin Cummins, pour expliquer le contexte, ainsi qu'une magnifique postface de la chercheuse et écrivaine Gail Crowther qui, pour vous donner le ton, a récemment écrit sur Sylvia Plath et Anne Sexton. Merveille. ©Yann Courtiau 2024

Laurent Graff
Belle journée pour mourir(Le Dilettante) 108 pages
«Chaque matin, je ne me réveille pas avec pour horizon le dernier jour du reste de ma vie. Au petit-déjeuner, je n’avale pas le café du condamné. Je ne pars pas travailler en jetant ma clé dans les égouts. À toute chose, je ne dis pas à quoi bon. Non. Je vis au bord du gouffre, mais je ne m’y précipite pas. Je ne vais pas me jeter dans la gueule du loup – ou les griffes du tigre. Je suis prêt, mais je ne suis pas pressé. Le tireur peut prendre son temps.»
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La littérature est un champ de mine et les livres - lorsqu’ils sont bons (donc : écris juste pour vous) - vous explosent au visage, laissant échapper leurs shrapnels de mots, d’idées et de révélations, qui, le plus souvent, modifieront non seulement le regard que vous porterez sur le monde qui vous entoure, mais la façon dont ce dernier vous percevra. Les romans de Laurent Graff, de par leurs constructions astucieuses, grâce à une riche fantaisie et cet imaginaire incongru, ce lyrisme discret et cette noirceur omniprésente, du fait d’une certaine exigence aussi - ils ne sont pas forcement « accessibles » -, sont toujours une véritable surprise et cette Belle journée pour mourir n'échappe pas à ce constat réjouissant. Bref texte haletant et entêtant, Belle journée pour mourir est un comme un écho à la chanson de David Bowie, Time, et ce passage, plus précisément, : « The sniper in the brain, regurgitating drain / Incestuous and vain / And many other last names / Oh, well, I look at my watch, it says nine twenty-five / And I think "Oh God, I'm still alive ». Ou alors celle de Daniel Darc et son groupe, Taxi Girl : « Elle est si belle qu'il est difficile / Aussi belle qu'une balle / De ne pas se pencher pour la regarder ». Intrigué, le lecteur va suivre le récit d’un homme sachant qu’un sniper mettra fin à ses jours. Aujourd’hui, demain, dans un an. On ne sait pas. Cette situation le laisse apprécier, avec une simplicité et une humilité désarmante, chaque instant qui reste. « Mon amour de la vie réside dans le quotidien, l’anodin, l’ordinaire majoré.» Résistant qui s’ignore dans une société annihilante, proche de la ligne de front d’un monde en guerre perpétuelle contre ses propres sujets – l’humanité -, c'est l'histoire d'un homme contraint dans ses habitudes soudainement contrariées, condamné à vivre dans le désir de mort. Et lorsque la tension dramatique est à son comble, le roman se mue en enquête qui permet d’éclairer les zones d’ombres du texte précédent. C’est malin, désespéré et étonnant ; c'est noir sans être du polar ; c'est philosophique, sans pathos et dépourvu d’indignation gratuite ; Belle journée pour mourir est à ranger entre les Carnets du sous-sol de Dostoïevski et Le Pressentiment d’Emmanuel Bove, avec tout l'oeuvre de Cioran dessous ou dessus, à vous de voir. Et ça, c’est pas rien. ©Yann Courtiau 2025
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La littérature est un champ de mine et les livres - lorsqu’ils sont bons (donc : écris juste pour vous) - vous explosent au visage, laissant échapper leurs shrapnels de mots, d’idées et de révélations, qui, le plus souvent, modifieront non seulement le regard que vous porterez sur le monde qui vous entoure, mais la façon dont ce dernier vous percevra. Les romans de Laurent Graff, de par leurs constructions astucieuses, grâce à une riche fantaisie et cet imaginaire incongru, ce lyrisme discret et cette noirceur omniprésente, du fait d’une certaine exigence aussi - ils ne sont pas forcement « accessibles » -, sont toujours une véritable surprise et cette Belle journée pour mourir n'échappe pas à ce constat réjouissant. Bref texte haletant et entêtant, Belle journée pour mourir est un comme un écho à la chanson de David Bowie, Time, et ce passage, plus précisément, : « The sniper in the brain, regurgitating drain / Incestuous and vain / And many other last names / Oh, well, I look at my watch, it says nine twenty-five / And I think "Oh God, I'm still alive ». Ou alors celle de Daniel Darc et son groupe, Taxi Girl : « Elle est si belle qu'il est difficile / Aussi belle qu'une balle / De ne pas se pencher pour la regarder ». Intrigué, le lecteur va suivre le récit d’un homme sachant qu’un sniper mettra fin à ses jours. Aujourd’hui, demain, dans un an. On ne sait pas. Cette situation le laisse apprécier, avec une simplicité et une humilité désarmante, chaque instant qui reste. « Mon amour de la vie réside dans le quotidien, l’anodin, l’ordinaire majoré.» Résistant qui s’ignore dans une société annihilante, proche de la ligne de front d’un monde en guerre perpétuelle contre ses propres sujets – l’humanité -, c'est l'histoire d'un homme contraint dans ses habitudes soudainement contrariées, condamné à vivre dans le désir de mort. Et lorsque la tension dramatique est à son comble, le roman se mue en enquête qui permet d’éclairer les zones d’ombres du texte précédent. C’est malin, désespéré et étonnant ; c'est noir sans être du polar ; c'est philosophique, sans pathos et dépourvu d’indignation gratuite ; Belle journée pour mourir est à ranger entre les Carnets du sous-sol de Dostoïevski et Le Pressentiment d’Emmanuel Bove, avec tout l'oeuvre de Cioran dessous ou dessus, à vous de voir. Et ça, c’est pas rien. ©Yann Courtiau 2025

Vincezo Latronico
Les perfections(Scribes) 174 pages
« Ce qui était arrivé à la ville – le remplacement des habitants historiques par de nouveaux arrivants plus jeunes et plus riches, l’augmentation des prix et l’homogénéité socioculturelle – avait été appelé gentrification : un mot connu presque exclusivement des personnes qui en étaient responsables. »
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La SPLPI (Société Protectrice des Livres Passés Inaperçus) devrait agir, et vite : une nouvelle rentrée approche et ils seront (presque) tous oubliés ces livres si prometteurs sortis par le passé, qu’on s’était promis de lire et puis non. Les Perfections est un premier roman, sorti en 2023 - c'est surtout un roman exemplaire. Traduit de l’italien par Romane Lafore, il ne s'était plus rien écrit d’aussi pertinent sur Berlin depuis au mois l’essai de Francesco Masci publié il y a dix ans chez Allia : L’ordre règne à Berlin. Mais à l’essai, le primo romancier Vincenzo Latronico préfère, lui, le roman sociologique. Le résultat est d’excellente facture. Tant par sa forme (le premier chapitre très Perec-ien qui prend tout son sens à la fin du livre) que par son fond, qui ne consiste pas en un énième pamphlet dénonçant la boboïsation – ou la gentrification – de Berlin, mais plutôt à une description aussi sensible que complexe d’un couple d’expatriés installé dans la capitale allemande, « freelance » dans le domaine des nouvelles technologies et qui ne parlent pas allemand mais plutôt le globish, duo qui cherche à faire de la vie une forme de «perfection», par mille et un détails précieux. Mais voilà que tout change, soi-même comme son environnement. Ce qui était abondance de temps et d’espace finit par se réduire et la tentative de fuite (en avant) vers Lisbonne puis la Sicile ne change rien, au contraire… Un roman bluffant par l’intelligence du regard porté sur notre société et ses contradictions.
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La SPLPI (Société Protectrice des Livres Passés Inaperçus) devrait agir, et vite : une nouvelle rentrée approche et ils seront (presque) tous oubliés ces livres si prometteurs sortis par le passé, qu’on s’était promis de lire et puis non. Les Perfections est un premier roman, sorti en 2023 - c'est surtout un roman exemplaire. Traduit de l’italien par Romane Lafore, il ne s'était plus rien écrit d’aussi pertinent sur Berlin depuis au mois l’essai de Francesco Masci publié il y a dix ans chez Allia : L’ordre règne à Berlin. Mais à l’essai, le primo romancier Vincenzo Latronico préfère, lui, le roman sociologique. Le résultat est d’excellente facture. Tant par sa forme (le premier chapitre très Perec-ien qui prend tout son sens à la fin du livre) que par son fond, qui ne consiste pas en un énième pamphlet dénonçant la boboïsation – ou la gentrification – de Berlin, mais plutôt à une description aussi sensible que complexe d’un couple d’expatriés installé dans la capitale allemande, « freelance » dans le domaine des nouvelles technologies et qui ne parlent pas allemand mais plutôt le globish, duo qui cherche à faire de la vie une forme de «perfection», par mille et un détails précieux. Mais voilà que tout change, soi-même comme son environnement. Ce qui était abondance de temps et d’espace finit par se réduire et la tentative de fuite (en avant) vers Lisbonne puis la Sicile ne change rien, au contraire… Un roman bluffant par l’intelligence du regard porté sur notre société et ses contradictions.
©Yann Courtiau 2024
les conseils de lecture
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Jean Echenoz
Bristol(Minuit) 206 pages
« Or cet incident, imprévu dans le script, n’est pas sans grever l’atmosphère dramatique de la scène. Même si sa dimension grotesque pourrait efficacement s’inscrire dans un autre genre de film, elle ne concorde pas avec le sens général du projet. Installé derrière la caméra sur son fauteuil pliant, face au petit moniteur à disque dur qui, par reprise vidéo, lui transmet l’image et le son de la scène, Bristol se voit contraint d’ordonner qu’on mette fin à cette prise : Coupez, crie-t-il. »
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Voilà un roman qui en laissera plus d’un.e perplexe et, paradoxalement, voilà bien le roman que les amateurs de Jean Echenoz attendaient : une comédie farfelue, un rien cocasse, beaucoup de zeugmes, de tournures singulières (ainsi, le personnage de Geneviève fronce un « sourcil budgétaire ») et puis notre écrivain qui, de temps à autre, se tourne vers le lecteur ou la lectrice pour lui donner un détail, lui suggérer une (non-)action, lui glisser une information incongrue qui fait immédiatement sourire. Cela dit, c’est omettre de signaler que Jean Echenoz ouvre des routes qui ne seront pas empruntées, fait entrer des personnages qui repartent aussitôt, laisse planer le doute en permanence à propos de ce vieux beau de Bristol, réalisateur de films un rien déçus dont on arrive décidemment pas à se décider si on l’apprécie – ou pas. Et puis il y a l’écrivaine de best-sellers Marjorie des Marais, les voisins de la rue des Eaux, un éléphant, on s’aime puis on se trompe pour un rien, on meurt bêtement, … si vous aviez aimé Envoyée spéciale ou Vie de Gérard Fulmard, si vous vous régalez des écrits d’Éric Chevillard ou de Iegor Gran, alors : oui oui oui, ce nouveau talentueux et si drôle roman de jean Echenoz est bien pour vous. Un régal.
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Voilà un roman qui en laissera plus d’un.e perplexe et, paradoxalement, voilà bien le roman que les amateurs de Jean Echenoz attendaient : une comédie farfelue, un rien cocasse, beaucoup de zeugmes, de tournures singulières (ainsi, le personnage de Geneviève fronce un « sourcil budgétaire ») et puis notre écrivain qui, de temps à autre, se tourne vers le lecteur ou la lectrice pour lui donner un détail, lui suggérer une (non-)action, lui glisser une information incongrue qui fait immédiatement sourire. Cela dit, c’est omettre de signaler que Jean Echenoz ouvre des routes qui ne seront pas empruntées, fait entrer des personnages qui repartent aussitôt, laisse planer le doute en permanence à propos de ce vieux beau de Bristol, réalisateur de films un rien déçus dont on arrive décidemment pas à se décider si on l’apprécie – ou pas. Et puis il y a l’écrivaine de best-sellers Marjorie des Marais, les voisins de la rue des Eaux, un éléphant, on s’aime puis on se trompe pour un rien, on meurt bêtement, … si vous aviez aimé Envoyée spéciale ou Vie de Gérard Fulmard, si vous vous régalez des écrits d’Éric Chevillard ou de Iegor Gran, alors : oui oui oui, ce nouveau talentueux et si drôle roman de jean Echenoz est bien pour vous. Un régal.
©Yann Courtiau 2024

Sarah Jollien-Fardel
La Longe(Sabine Wespieser) 154 pages
« Je marche sans longe, je m’éloigne chaque jour un peu de notre bâtisse. Je grimpe difficilement les chemins escarpés, les muscles engourdis par les mois d’enfermement. Je m’y attelle, malgré tout. Le reste du temps, je lis, je relis, et je prépare la venue de l’hiver. »
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Si le drame est (toujours) présent dans ce deuxième roman de Sarah Jollien-Fardel, elle n’en fait pas tout à fait le centre de son histoire mais convie plutôt la lectrice et le lecteur a se laisser porter par l'histoire de la narratrice dans un aller-retour captivant entre l’enfance et l’âge adulte. De nombreux personnages, bien incarnés, viennent renforcer l’attrait de La Longe ; je pense d’abord à la famille et le frère en particulier, promis à un grand avenir sportif mais cassé par la vie, les grands-parents aussi - subliment et d’un autre temps -, tant d’autres encore. Les différences de génération sont habilement évoquées, le cours de la vie (les choix, si cruciaux) ainsi que les déplacements (l’éloignement vers la ville puis le retour aux sources) brossés avec soin. La bande originale ? Radiohead, Neil Young, Antony & The Johnsons, Spiritualized – chansons toujours à propos. Ici, aucun mélodrame, mais une tragédie, une vraie, superbe, qui bouleverse. Et si la narratrice semble perdre pied, c’est pour ensuite se reconstruire dans un lieu à l’écart du bruit du monde, une « chambre à soi », aidée en par une amitié naissante et une pharmacopée composée de livres, de textes : ceux de Rilke, Pessoa, Duras ou encore Delbo, mais aussi John Fante et son fameux Chien Stupide. Et au lieu d’en dire plus et forcement trop, je vous exhorte plus simplement à le lire ce roman - il est bien.
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Si le drame est (toujours) présent dans ce deuxième roman de Sarah Jollien-Fardel, elle n’en fait pas tout à fait le centre de son histoire mais convie plutôt la lectrice et le lecteur a se laisser porter par l'histoire de la narratrice dans un aller-retour captivant entre l’enfance et l’âge adulte. De nombreux personnages, bien incarnés, viennent renforcer l’attrait de La Longe ; je pense d’abord à la famille et le frère en particulier, promis à un grand avenir sportif mais cassé par la vie, les grands-parents aussi - subliment et d’un autre temps -, tant d’autres encore. Les différences de génération sont habilement évoquées, le cours de la vie (les choix, si cruciaux) ainsi que les déplacements (l’éloignement vers la ville puis le retour aux sources) brossés avec soin. La bande originale ? Radiohead, Neil Young, Antony & The Johnsons, Spiritualized – chansons toujours à propos. Ici, aucun mélodrame, mais une tragédie, une vraie, superbe, qui bouleverse. Et si la narratrice semble perdre pied, c’est pour ensuite se reconstruire dans un lieu à l’écart du bruit du monde, une « chambre à soi », aidée en par une amitié naissante et une pharmacopée composée de livres, de textes : ceux de Rilke, Pessoa, Duras ou encore Delbo, mais aussi John Fante et son fameux Chien Stupide. Et au lieu d’en dire plus et forcement trop, je vous exhorte plus simplement à le lire ce roman - il est bien.
©Yann Courtiau 2024

Eric Chauvier
Le lac inconnu(Allia) 106 pages
« L’effervescence se mue en frénésie. Et l’angoisse se dissipe un peu plus. Peut-être même pourrait pourrait-elle disparaître. Il leur suffirait de commercer sans pause et sans retenue. Ce plan sera suivi à la lettre. »
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Du lac, Thoreau disait que c’est « l’œil de la terre » : ce lieu où le spectateur, en y plongeant le regard, y sonde sa propre nature. Avec ce Lac inconnu, Chauvier, lui, nous propose à peu près la même chose : d’y sonder la nature de l’humain certes, mais celui des origines et de sa naissante angoisse dû découverte de sa finitude, de sa peur du néant, de ne pas savoir ce qu’il y après. Pour y remédier, l’Homme crée la « distraction ». celle-ci sera, au fil de l’Histoire et de l’évolution, tantôt le travail, la possession de biens, la guerre, le commerce ou encore la religion. Dans ce récit aussi étonnant que pertinent - qui couvre quelques millénaires ! - se cache aussi un essai de critique sociale et un roman de science-fiction. « Habiter ce monde en poète, ce serait cheminer vers une sorte d’apaisement. Bien, mais qui lit les poètes ? ». Et quelques pages plus loin, ce constat amer : « Si bien que chacun persiste dans son agitation spéculatrice, dans son menu train d’entropie, dans son petit bonhomme de dévastation, souriant presque au désastre qui s’annonce. ». Tour à tour le lecteur pensera à la Guerre du feu, à la Société du spectacle ou encore à 2011 L’Odyssée de l’espace, avant de revenir à l’image du lac. Un lac inconnu. Épatant.
©Yann Courtiau 2024
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Du lac, Thoreau disait que c’est « l’œil de la terre » : ce lieu où le spectateur, en y plongeant le regard, y sonde sa propre nature. Avec ce Lac inconnu, Chauvier, lui, nous propose à peu près la même chose : d’y sonder la nature de l’humain certes, mais celui des origines et de sa naissante angoisse dû découverte de sa finitude, de sa peur du néant, de ne pas savoir ce qu’il y après. Pour y remédier, l’Homme crée la « distraction ». celle-ci sera, au fil de l’Histoire et de l’évolution, tantôt le travail, la possession de biens, la guerre, le commerce ou encore la religion. Dans ce récit aussi étonnant que pertinent - qui couvre quelques millénaires ! - se cache aussi un essai de critique sociale et un roman de science-fiction. « Habiter ce monde en poète, ce serait cheminer vers une sorte d’apaisement. Bien, mais qui lit les poètes ? ». Et quelques pages plus loin, ce constat amer : « Si bien que chacun persiste dans son agitation spéculatrice, dans son menu train d’entropie, dans son petit bonhomme de dévastation, souriant presque au désastre qui s’annonce. ». Tour à tour le lecteur pensera à la Guerre du feu, à la Société du spectacle ou encore à 2011 L’Odyssée de l’espace, avant de revenir à l’image du lac. Un lac inconnu. Épatant.
©Yann Courtiau 2024

Kid Congo Powers
Some New Kind of Kick - autobiographietraduit de l'anglais par Angélique Merklen
(Le Boulon) 288 pages
« Ma vie se résumait de plus en plus à la musique et à mon statut de fan. Le lycée m’ennuyait. En fait de littérature, j’en apprenais plus avec Patti Smith qu’en cours d’anglais. C’est elle qui m’a fait connaitre Burroughs et Baudelaire, les poètes symbolistes français et la Beat Generation. Une graine de désolation romantique avait été plantée dans mon esprit adolescent fertile, prête à germer. Dans les faits, je consommais de la drogue, j’avais des relations sexuelles sans lendemain, je trainais avec des groupes de rock’n’roll et je gagnais mes galons en développant une intelligence de la rue et les joies des petits méfaits avec mon gang de délinquants juvéniles – le tout avant mon dix-huitième anniversaire. »
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Il faut lire ce livre. Vraiment. D’abord parce Kid Congo Powers est un cas singulier du petit monde du rock : un jeune grindalet latino, pas tout à fait à sa place à Los Angeles. gay et amateur de disco et qui devient, à partir de 1975, un fan absolu de Patti Smith puis des Ramones dont il fonde le fan-club de la cote ouest. Au gré d’un court séjour à New York, pour aller voir quelques concerts au mythique club CBGB, le voilà qui squatte chez Lydia Lunch qui a la bonne idée de lui mettre une guitare entre les mains - c’est parti. Kid Congo Powers sera guitariste pour les Cramps puis avec son ami Jeffrey Lee Pierce au sein du Gun Club. Sur la route, il côtoie Siouxsie & The Banshess et Blix Bargeld, ira poser ses lourdes valises sous ses yeux à Berlin puis Londres ; il jouera plus tard encore et pour quelques temps au sein des Bad Seeds de Nick Cave et il aura même comme petit-ami Ron Athey fondateur avec Rozz Williams du groupe expérimental Premature Ejaculation). Écrit avec sincérité et humour, c’est une vie chaotique que nous peint là Kid Congo, avec des hauts et des bas (beaucoup), la drogue, le sida, les petits boulots pour survivre (il travaille notamment pour le libraire Arthur Nersesian qui écrit à cette époque son livre Fuck-Up, récemment traduit en français aux éditions de La Croisée!), les occasions manquées, les amis, les amours, la familles, les vivants et les morts. Sortez vos disques : Las Vegas Story du Gun Club, Psychedelic Jungle des Cramps ou encore The Good Son de Nick Cave & The Bad Seeds, la bande-son de rêve de ce livre qui n’est pas moins une réussite en matière de biographie rock (mais pas que) et passionnant comme un roman.
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Il faut lire ce livre. Vraiment. D’abord parce Kid Congo Powers est un cas singulier du petit monde du rock : un jeune grindalet latino, pas tout à fait à sa place à Los Angeles. gay et amateur de disco et qui devient, à partir de 1975, un fan absolu de Patti Smith puis des Ramones dont il fonde le fan-club de la cote ouest. Au gré d’un court séjour à New York, pour aller voir quelques concerts au mythique club CBGB, le voilà qui squatte chez Lydia Lunch qui a la bonne idée de lui mettre une guitare entre les mains - c’est parti. Kid Congo Powers sera guitariste pour les Cramps puis avec son ami Jeffrey Lee Pierce au sein du Gun Club. Sur la route, il côtoie Siouxsie & The Banshess et Blix Bargeld, ira poser ses lourdes valises sous ses yeux à Berlin puis Londres ; il jouera plus tard encore et pour quelques temps au sein des Bad Seeds de Nick Cave et il aura même comme petit-ami Ron Athey fondateur avec Rozz Williams du groupe expérimental Premature Ejaculation). Écrit avec sincérité et humour, c’est une vie chaotique que nous peint là Kid Congo, avec des hauts et des bas (beaucoup), la drogue, le sida, les petits boulots pour survivre (il travaille notamment pour le libraire Arthur Nersesian qui écrit à cette époque son livre Fuck-Up, récemment traduit en français aux éditions de La Croisée!), les occasions manquées, les amis, les amours, la familles, les vivants et les morts. Sortez vos disques : Las Vegas Story du Gun Club, Psychedelic Jungle des Cramps ou encore The Good Son de Nick Cave & The Bad Seeds, la bande-son de rêve de ce livre qui n’est pas moins une réussite en matière de biographie rock (mais pas que) et passionnant comme un roman.
©Yann Courtiau 2024
les conseils de lecture
nos libraires aiment (beaucoup) :

Jason
La Mort à Trieste(Atrabile) 184 pages
« - Alors, Dada, c'est quoi ?
- Dada, c'est la raison par la folie, c'est un cri abstrait et primitif contre l'Art. Contre le monde. Contre la réalité.
Sans oublier que c'est un coup de pied dans les couilles du bon goût de la bourgeoisie, ah ah, pour être honnête.
Une tasse de café ?
- D'accord. »
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David Bowie, Raspoutine, les groupes Ultravox et Eurythmics, Magritte, le club Dada, un portrait d’Aleister Crowley, une peinture de Munch, cette Mort à Trieste - de Jason - est bourrée de références alléchantes, amusantes et parfois pertinentes. Trois histoires, dont la centrale, elle-même composée d’une multitudes de petites histoires, qui toutes anticipent peu ou prou une catastrophe à venir, inévitable, inéluctable. Cette bande dessinée ne colle pas au réel (et c’est tant mieux), vous l’aurez sans doute deviné, mais elle n'en est pas moins actuelle et c’est peut-être l'un de ces points forts. Il y a aussi les personnages, le style reconnaissable, et cette tendances presque surréaliste à conter des histoires dont le lecteur en sortira comme d’un rêve ou, plutôt, comme l’écrivait Magritte à André Breton, d’un mystère (« Toute chose ne saurait exister sans son mystère »). Fort plaisant.
©Yann Courtiau 2025

Sylvie Dazy
Incarnat(Le Dilettante) 122 pages
« De nos talents médiocres et de nos corps vulgaires nous autres pauvres mortelles nous ne sommes pas fières, trainant une flétrissure différente du passé, mais similaire ; la plèbe des quelconques, des abîmées, avance à pas lent vers la sortie et sans trop la ramener s’il vous plaît »
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La violence et l’anarchie de Fight Club, le ton percutent de King Gong Théorie et le génie du monologue tendu façon Principe de réalité ouzbek de Tiphaine Le Gall (si vous n’avez pas lu, faites-le : c’est un excellent texte), voilà un peu la recette d’Incarnat. Incarnat, oui, comme la teinte vive que donne le sang affluant au visage lorsqu’on est sous le coup d’une agitation émotionnelle et c’est le cas de la narratrice qui se demande pourquoi « (…) à trente ans, la vie me semblait-elle finie ? ». Parents divorcés, marais social, coups et injustice, tout cela et plus encore conduisent la narratrice – Loune – à faire un stage avec d’autres personnes (une majorité écrasante d'hommes, bien sûr) ayant commis violence sur autrui. C’est l’engrenage… Incarnat est porté par une langue rude et crue née d’une intelligence vive et subtile pour en venir à son propos. On ne lâche pas le livre, on suit, page après page et on se met à comprendre Loune. Et voilà que nos certitudes en prennent un coup - de génie. @Yann Courtiau 2025
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La violence et l’anarchie de Fight Club, le ton percutent de King Gong Théorie et le génie du monologue tendu façon Principe de réalité ouzbek de Tiphaine Le Gall (si vous n’avez pas lu, faites-le : c’est un excellent texte), voilà un peu la recette d’Incarnat. Incarnat, oui, comme la teinte vive que donne le sang affluant au visage lorsqu’on est sous le coup d’une agitation émotionnelle et c’est le cas de la narratrice qui se demande pourquoi « (…) à trente ans, la vie me semblait-elle finie ? ». Parents divorcés, marais social, coups et injustice, tout cela et plus encore conduisent la narratrice – Loune – à faire un stage avec d’autres personnes (une majorité écrasante d'hommes, bien sûr) ayant commis violence sur autrui. C’est l’engrenage… Incarnat est porté par une langue rude et crue née d’une intelligence vive et subtile pour en venir à son propos. On ne lâche pas le livre, on suit, page après page et on se met à comprendre Loune. Et voilà que nos certitudes en prennent un coup - de génie. @Yann Courtiau 2025

Thomas E. Florin
Autodafé, comment les livres ont gâché ma vie(Gospel) 90 pages
« Les livres ont gagné. Les livres m’ont attaché. Ils m’ont mis cette idée en tête, m’ont fait signer ce pacte. Même le diable n’exige pas autant. La fidélité ou le suicide, qu’est-ce que c’est que ce contrat ? Le diable, au moins, offre des plaisir, du divertissement, son et lumière. Qu’ont à offrir les livres en échange d’une vie. »
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Faut-il brûler les livres ? voilà le sujet du seul et unique roman de Canetti intitulé Auto-da-fé, auquel cet autre très singulier livre fait bien sûr une inquiétante référence en ajoutant encore : Comment les livres ont gâché ma vie. La lectrice, le lecteur – surtout ceux qui empilent les livres partout chez eux -, s’attend alors à un livre sarcastique, une bagatelle amusante, une pochade incendiaire. Mais non. D’abord parce que le livre est bien plus sérieux qu’on ne pourrait le penser, et aussi car sa forme est hautement intéressante. Nous n’avons là ni un récit, ni un journal - encore moins une autofiction - mais plutôt l’autoportrait littéraire de l’auteur en personnage de roman qui tente d’écrire ce qu’on a entre les mains. Et ces nombreuses questions que pose le texte : que font-ils de nous, pauvres pêcheurs de mots, ces livres lus ou pas qui s’entassent dans nos appartements de plus en plus petits ? L’obsession, parfois d’une vie entière, qui nous dessine socialement… tout ça pour finir dans une benne à ordures après notre mort ? Vient encore l’idée de la récupération, de la mémoire qui colle aux livres avant que le livre ne se renverse en éloge de la lecture, du langage et des livres, et que le pouvoir de l’écriture l’emporte aussi. Limpide, sobre et simple, ce roman (qui n’en est pas tout à fait un) de Thomas E. Florin est vraiment bien. À lire en écoutant By the fire, de Thurston Moore (cité dans le livre !), et se rangera auprès d’autres livres insolites tel que Le Pilon (de Desalmand, chez Quidam), Le deuil de la littérature (de Deriquebourg, chez Allia) ou encore Incognita incognita ou le plaisir de trouver ce qu’on ne cherchait pas (de Forsyth, traduit de l’anglais par Marie-Noël Rio, aux éditions du Sonneur). Tout ça pour dire que les éditions du Gospel, qui publie cet excellent Autodafé, sont à surveiller de près et reste une alternative de goût et de qualité.
©Yann Courtiau 2025
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Faut-il brûler les livres ? voilà le sujet du seul et unique roman de Canetti intitulé Auto-da-fé, auquel cet autre très singulier livre fait bien sûr une inquiétante référence en ajoutant encore : Comment les livres ont gâché ma vie. La lectrice, le lecteur – surtout ceux qui empilent les livres partout chez eux -, s’attend alors à un livre sarcastique, une bagatelle amusante, une pochade incendiaire. Mais non. D’abord parce que le livre est bien plus sérieux qu’on ne pourrait le penser, et aussi car sa forme est hautement intéressante. Nous n’avons là ni un récit, ni un journal - encore moins une autofiction - mais plutôt l’autoportrait littéraire de l’auteur en personnage de roman qui tente d’écrire ce qu’on a entre les mains. Et ces nombreuses questions que pose le texte : que font-ils de nous, pauvres pêcheurs de mots, ces livres lus ou pas qui s’entassent dans nos appartements de plus en plus petits ? L’obsession, parfois d’une vie entière, qui nous dessine socialement… tout ça pour finir dans une benne à ordures après notre mort ? Vient encore l’idée de la récupération, de la mémoire qui colle aux livres avant que le livre ne se renverse en éloge de la lecture, du langage et des livres, et que le pouvoir de l’écriture l’emporte aussi. Limpide, sobre et simple, ce roman (qui n’en est pas tout à fait un) de Thomas E. Florin est vraiment bien. À lire en écoutant By the fire, de Thurston Moore (cité dans le livre !), et se rangera auprès d’autres livres insolites tel que Le Pilon (de Desalmand, chez Quidam), Le deuil de la littérature (de Deriquebourg, chez Allia) ou encore Incognita incognita ou le plaisir de trouver ce qu’on ne cherchait pas (de Forsyth, traduit de l’anglais par Marie-Noël Rio, aux éditions du Sonneur). Tout ça pour dire que les éditions du Gospel, qui publie cet excellent Autodafé, sont à surveiller de près et reste une alternative de goût et de qualité.
©Yann Courtiau 2025

Christophe Schenk
The Second Tindersticks Album(Densité) 140 pages
« Soudain, tous les éléments semblaient se mettre ensemble pour faire de The Second Tindersticks Album la pièce maîtresse d’une carrière qui n’avait jamais eu le succès qu’elle méritait, à mon sens.»
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Comme on se plonge dans la « lecture » d’un classique littéraire signé par un spécialiste, pour mieux en saisir les enjeux, entrevoir les tenants et les aboutissants, se faire lister les influences (et même les quelques plagiats discrets), on s’immerge tout pareil dans la collection Discogonie en général et dans ce nouvel essai de Christophe Schenk en particulier, entièrement dédié à un disque du groupe Tindersticks : The Second Tindersticks Album. Rébarbatif ? Seulement destiné au fanatiques ? Non, non, non, au contraire, on a là un véritable « portrait de groupe » au sens large, un retour sur le contexte de l’époque (le mitan des années 1990 principalement) et surtout un livre qui sonde - non pas l’échec, attention - mais plutôt l’insuccès de musiciens qui ont su s’en accommoder et peut-être même en faire une marque de fabrique. Il faut signaler aussi que Christophe Schenk, en bon journaliste (admirateur des Tindersticks et collectionneur obsessionnel de disques !), est allé nous dénicher des dizaines d’extraits d’entretiens pour donner un sens choral à son livre et étoffer le récit d’un disque qui, sans quitter la forme de l’essai aussi généreux qu'intéressant, en devient un véritable roman. Témoignage d’une façon de faire de la musique, de la vivre, Schenk traite les chansons isolément, parle des tenues vestimentaires, des accointances (notamment avec Nick Cave & The Bad Seeds), des influences (la batterie de Five Years de Bowie par exemple), de la pochette, des photographies, des différents éditions, des notes, des textes, de la réception hier et aujourd’hui de ce fameux Tindersticks Second Album. Un véritable plaisir pour s’abîmer dans la musique de ce groupe à la longévité incroyable et notamment avec le titre A Night in, quand Stuart Staples rumine : « Les soucis du quotidien semblent s'évanouir. La fin du jour apporte la libération. ».
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Comme on se plonge dans la « lecture » d’un classique littéraire signé par un spécialiste, pour mieux en saisir les enjeux, entrevoir les tenants et les aboutissants, se faire lister les influences (et même les quelques plagiats discrets), on s’immerge tout pareil dans la collection Discogonie en général et dans ce nouvel essai de Christophe Schenk en particulier, entièrement dédié à un disque du groupe Tindersticks : The Second Tindersticks Album. Rébarbatif ? Seulement destiné au fanatiques ? Non, non, non, au contraire, on a là un véritable « portrait de groupe » au sens large, un retour sur le contexte de l’époque (le mitan des années 1990 principalement) et surtout un livre qui sonde - non pas l’échec, attention - mais plutôt l’insuccès de musiciens qui ont su s’en accommoder et peut-être même en faire une marque de fabrique. Il faut signaler aussi que Christophe Schenk, en bon journaliste (admirateur des Tindersticks et collectionneur obsessionnel de disques !), est allé nous dénicher des dizaines d’extraits d’entretiens pour donner un sens choral à son livre et étoffer le récit d’un disque qui, sans quitter la forme de l’essai aussi généreux qu'intéressant, en devient un véritable roman. Témoignage d’une façon de faire de la musique, de la vivre, Schenk traite les chansons isolément, parle des tenues vestimentaires, des accointances (notamment avec Nick Cave & The Bad Seeds), des influences (la batterie de Five Years de Bowie par exemple), de la pochette, des photographies, des différents éditions, des notes, des textes, de la réception hier et aujourd’hui de ce fameux Tindersticks Second Album. Un véritable plaisir pour s’abîmer dans la musique de ce groupe à la longévité incroyable et notamment avec le titre A Night in, quand Stuart Staples rumine : « Les soucis du quotidien semblent s'évanouir. La fin du jour apporte la libération. ».
©Yann Courtiau 2025
les conseils de lecture
nos libraires aiment (beaucoup) :

Katja Petrowskaja
La photo me regardait(Macula) 248 pages
« Toute photo est le fragment d’un monde, arraché au temps et à l’espace. Nous ne voyons que ce fragment, qui tente de se présenter comme le monde dans sa totalité ou comme une partie représentative – si ce n’est comme métaphore, du moins comme « pars pro toto ». »
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Des photographies de Maya Deren , de Francesca Woodman, de la photographe géorgienne Natela Grigalashvili, du photographe et cinéaste suisse d'origine juive polonaise Helmar Lerski - dont le travail esthétique anticipe de façon saisissante (et paradoxale) celui de Leni Riefenstahl et Arno Breker -, des photographies anciennes, parfois de famille, actuelles, chinées, découvertes par hasard dans une bibliothèque, commentées avec finesse, justesse, intelligence et beauté – c’est là toute l’originalité et la force tranquille de ce merveilleux livre de Katja Petrowskaja. Il s’agit de déchiffrer ce petit bout de temps. Qui et quoi et quand au juste ? On est saisi de malaise en découvrant la photo de La « Course (cycliste) de la paix », à Kiev en 1986, alors que la foule n’est pas au courant de la catastrophe de Tchernobyl arrivée quelques jours plus tôt, puis on est ému par ce cliché d’un chanteur d’opéra – Moses LaMarr -, durant la tournée de l’Everyman Opery company, en manteau de couleur claire, dans la neige d’un parc de Leningrad en 1955, devant une audience d’enfants et de femmes éblouis et touchés de se trouver là, de voir un noir, d’entendre sa voix, son chant, situation œuvrant comme une l’image parfaite du « dégel » soviétique, même si cette tournée cachait un but politico-idéologique (pour les deux camps, comme l’explique si bien Katja Petrowskaja), mais qui s’en affranchit si bien, durant ce bref moment de contact humain. La Photo me regardait est un recueil de nouvelles et d’essais autant qu’un journal qui permet, lorsqu’on regarde bien – lorsqu’on y plonge ! -, de parler du passé, de penser le contemporain, d’évacuer comme de recevoir. 57 photographies et mille histoires. Sublime.©Yann Courtiau 2025
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Des photographies de Maya Deren , de Francesca Woodman, de la photographe géorgienne Natela Grigalashvili, du photographe et cinéaste suisse d'origine juive polonaise Helmar Lerski - dont le travail esthétique anticipe de façon saisissante (et paradoxale) celui de Leni Riefenstahl et Arno Breker -, des photographies anciennes, parfois de famille, actuelles, chinées, découvertes par hasard dans une bibliothèque, commentées avec finesse, justesse, intelligence et beauté – c’est là toute l’originalité et la force tranquille de ce merveilleux livre de Katja Petrowskaja. Il s’agit de déchiffrer ce petit bout de temps. Qui et quoi et quand au juste ? On est saisi de malaise en découvrant la photo de La « Course (cycliste) de la paix », à Kiev en 1986, alors que la foule n’est pas au courant de la catastrophe de Tchernobyl arrivée quelques jours plus tôt, puis on est ému par ce cliché d’un chanteur d’opéra – Moses LaMarr -, durant la tournée de l’Everyman Opery company, en manteau de couleur claire, dans la neige d’un parc de Leningrad en 1955, devant une audience d’enfants et de femmes éblouis et touchés de se trouver là, de voir un noir, d’entendre sa voix, son chant, situation œuvrant comme une l’image parfaite du « dégel » soviétique, même si cette tournée cachait un but politico-idéologique (pour les deux camps, comme l’explique si bien Katja Petrowskaja), mais qui s’en affranchit si bien, durant ce bref moment de contact humain. La Photo me regardait est un recueil de nouvelles et d’essais autant qu’un journal qui permet, lorsqu’on regarde bien – lorsqu’on y plonge ! -, de parler du passé, de penser le contemporain, d’évacuer comme de recevoir. 57 photographies et mille histoires. Sublime.©Yann Courtiau 2025

Cécile Barth-Rabot
La lecture(Armand Colin) 316 pages
« Nul ne peut donc être complètement sûr de la satisfaction qu’il pourra trouver dans une lecture (y compris lorsqu’un tiers fait de l’ouvrage une critique positive). Tout au plus peut-on tenter de réduire l’incertitude, en s’appuyant par exemple sur l’expérience que d’autres ont faite du même objet (avec l’incertitude inhérente à la singularité des sujets lecteurs) ou sur l’expérience qu’on a soi-même faite d’objets en apparence similaire, produits par exemple par le même auteur ou le même éditeur (avec l’incertitude tenant cette fois à la singularité des objets de lecture). »
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Pour ce 23 avril, Journée mondiale du livre et du droit d'auteur, qui met en valeur l’écriture et – ce qui nous intéresse surtout : la lecture, il fallait bien se pencher un peu sur cette dernière, qui, précise l’autrice de cette passionnante recherche : «suscite une abondance singulière de discours, qui la décrivent comme menacée ou qui en vantent les mérites, et qui, se faisant, en soulignent et en renforcent la valeur. » Lecture et souci de soi, logiques de choix, postures, valeur et visibilité, etc. autant de chapitres qui permettent de définir avec autant de nuances que de détails cet « objet sacré » (ne pas prendre au sérieux) qu’est le livre, sa lecture (littéraire, si possible), ainsi que le lecteur lui-même. Mais cet essai qui a le mérite d’être exhaustif, a la particularité bien intéressante de démonter quelques clichés, notamment du rôle de la lecture scolaire ou bien celui des discours institutionnels ronflants du type « Lisez ! Vous en sortirez meilleur, grandi, cultivé », discours sensés s’adresser à toutes et tous et provoquez des envies de lecture, mais n’est entendu que par le (petit) public de convaincus – de lectrices et de lecteurs. Alors oui, sans aucun doute, la lecture peut constituer un refuge, une ouverture et un outil d’émancipation, mais cela tient à certaines conditions, aux dispositions de l’individu, au temps dont on dispose, etc. Comme le précise encore Cécile Barth-Rabot : « En d’autres termes, l’espace du lire n’est jamais donné, mais plutôt conquis et toujours doublement déterminé socialement par les dispositions des individus et leurs conditions matérielles d’existence. » Et plus loin encore : « Il s’agit donc pour un individu de trouver non seulement un texte qui lui convienne de manière générale, mais un texte qui soit adapté au moment considéré, qu’il puisse lire "à ce moment-là" avec plaisir et profit. La lecture, de Cécile Barth-Rabot, dans la collection U, Armand Colin, 316 pages essentielles (j’aimerais dire : obligatoires) pour tout professionnel du livre, surtout les institutions d’état, et autres férus de livres et de littérature - et de sa lecture, bien sûr.
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Pour ce 23 avril, Journée mondiale du livre et du droit d'auteur, qui met en valeur l’écriture et – ce qui nous intéresse surtout : la lecture, il fallait bien se pencher un peu sur cette dernière, qui, précise l’autrice de cette passionnante recherche : «suscite une abondance singulière de discours, qui la décrivent comme menacée ou qui en vantent les mérites, et qui, se faisant, en soulignent et en renforcent la valeur. » Lecture et souci de soi, logiques de choix, postures, valeur et visibilité, etc. autant de chapitres qui permettent de définir avec autant de nuances que de détails cet « objet sacré » (ne pas prendre au sérieux) qu’est le livre, sa lecture (littéraire, si possible), ainsi que le lecteur lui-même. Mais cet essai qui a le mérite d’être exhaustif, a la particularité bien intéressante de démonter quelques clichés, notamment du rôle de la lecture scolaire ou bien celui des discours institutionnels ronflants du type « Lisez ! Vous en sortirez meilleur, grandi, cultivé », discours sensés s’adresser à toutes et tous et provoquez des envies de lecture, mais n’est entendu que par le (petit) public de convaincus – de lectrices et de lecteurs. Alors oui, sans aucun doute, la lecture peut constituer un refuge, une ouverture et un outil d’émancipation, mais cela tient à certaines conditions, aux dispositions de l’individu, au temps dont on dispose, etc. Comme le précise encore Cécile Barth-Rabot : « En d’autres termes, l’espace du lire n’est jamais donné, mais plutôt conquis et toujours doublement déterminé socialement par les dispositions des individus et leurs conditions matérielles d’existence. » Et plus loin encore : « Il s’agit donc pour un individu de trouver non seulement un texte qui lui convienne de manière générale, mais un texte qui soit adapté au moment considéré, qu’il puisse lire "à ce moment-là" avec plaisir et profit. La lecture, de Cécile Barth-Rabot, dans la collection U, Armand Colin, 316 pages essentielles (j’aimerais dire : obligatoires) pour tout professionnel du livre, surtout les institutions d’état, et autres férus de livres et de littérature - et de sa lecture, bien sûr.
©Yann Courtiau 2025

Béatrice Commengé
Ne jamais arriver(Verdier) 156 pages
« Se pourrait-il que mon île se situât bel et bien sur un lac ? Puisque l’on m’obligeait à rester chez moi, puisque le rêve de découvrir mon île après une longue traversée de quatre pays aux frontières désormais fermées m’était interdit, il m’avait suffit d’un clic pour satisfaire ma curiosité : insula Ovidiu était, en effet, située au milieu du lac Siutghiol, séparé de la haute mer par une langue de terre sablonneuse transformée en l’une de ces stations balnéaires hérissées d’hôtels monotones avec « vue sur la mer » et d’aires de jeux aux toboggans multicolores. L’été, tandis que les plages se couvraient de parasols et de cris d’enfants, l’île vendait son calme et sa verdure aux touristes épris de silence : vingt minutes suffisaient pour poser le pied sur une légende. »
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Ce récit d’un voyage différé sur les traces d’Ovide – l’exilé par excellence -, fait écho aux mots de Starobinski qui (dans la Nuit de Troie) écrivait que l’exil était : « l’ouverture simultanée sur un passé remémoré et sur un futur où l’action va se porter. » Avec le confinement, Béatrice Commengé va faire l’expérience d’une forme nouvelle d’exil intérieur. Ainsi, recluse, elle imagine son voyage et, à défaut d’espaces et de routes, plonge dans le passé de l’auteur des Métamorphoses, lui-même chassé de Rome à cause de ses écrits licencieux. Assigné à résidence dans la ville de Tomis, en Scythie mineure - l'actuelle Constanța, en Roumanie -, Ovide y écrit des poèmes de lamentations et de nostalgie (les Tristes et les Pontiques) et vit son exil comme un assassinat. Dans L’Art d’Aimer, le poète raconte comment faire durer la passion ; c’est au tour de Béatrice Commengé de prolonger la fièvre et le désir puisqu’au fur et à mesure que les frontières s’ouvrent à nouveau, l’autrice tente de prendre la route aux côtés d’Ovide, étirant le temps, ralentissant ce périple qui devient long et sinueux, se remémorant ses premiers voyages en Italie, passant par mille et un détours géographiques comme pour mieux retarder son arrivée sur cette île de tous les fantasmes. Récit littéraire et de voyage autant que biographique, d’une douceur inouïe, Ne jamais arriver rappelle en nous que le livre est peut-être, avant tout, un désir de solitude et de calme bienvenu. Merveille. ©Yann Courtiau 2024
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Ce récit d’un voyage différé sur les traces d’Ovide – l’exilé par excellence -, fait écho aux mots de Starobinski qui (dans la Nuit de Troie) écrivait que l’exil était : « l’ouverture simultanée sur un passé remémoré et sur un futur où l’action va se porter. » Avec le confinement, Béatrice Commengé va faire l’expérience d’une forme nouvelle d’exil intérieur. Ainsi, recluse, elle imagine son voyage et, à défaut d’espaces et de routes, plonge dans le passé de l’auteur des Métamorphoses, lui-même chassé de Rome à cause de ses écrits licencieux. Assigné à résidence dans la ville de Tomis, en Scythie mineure - l'actuelle Constanța, en Roumanie -, Ovide y écrit des poèmes de lamentations et de nostalgie (les Tristes et les Pontiques) et vit son exil comme un assassinat. Dans L’Art d’Aimer, le poète raconte comment faire durer la passion ; c’est au tour de Béatrice Commengé de prolonger la fièvre et le désir puisqu’au fur et à mesure que les frontières s’ouvrent à nouveau, l’autrice tente de prendre la route aux côtés d’Ovide, étirant le temps, ralentissant ce périple qui devient long et sinueux, se remémorant ses premiers voyages en Italie, passant par mille et un détours géographiques comme pour mieux retarder son arrivée sur cette île de tous les fantasmes. Récit littéraire et de voyage autant que biographique, d’une douceur inouïe, Ne jamais arriver rappelle en nous que le livre est peut-être, avant tout, un désir de solitude et de calme bienvenu. Merveille. ©Yann Courtiau 2024

Laure Murat
Toutes les époques sont dégueulasses(Verdier) 76 pages
« Car le problème reste entier. Que faire avec ces œuvres populaires mais qui ne répondent plus à nos critères et diffusent des stéréotypes dont il est plus que jamais nécessaire de se débarrasser ? La réécriture des œuvres s’avère n’être pas la solution. Elle falsifie l’histoire, sans même rappeler qu’elle échoue dans sa mission en laissant passer des énormités. (…) Ses petits trucages médiocres l’assimilent à une censure du pauvre, quand la censure d’État, la vraie, menace plus que jamais, notamment aux Etats-Unis, où on ferme purement et simplement, comme en Floride, des départements de sociologie par haine de la pensée critique. »
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Courrez donc acheter cet essai de Laure Murat car il s’avère concis et bien utile pour replacer la parole comme la réflexion au-dessus du bruit ambiant qui noie tout débat intelligent au sujet de la récriture (ou pas) de classiques qui sonnent mal à nos contemporaines (et peut-être trop sensibles) oreilles ; après sa rapide et plaisante lecture vous en sortirez bien mieux informé sur cette réécriture au « goût du jour » (goût qui sera dépassé dès le lendemain) mais aussi pourquoi et comment on réécrit aussi pour vendre à nouveau, aux bibliothèques comme aux librairies, des histoires qui, dans leur nouvel emballage, seront adaptées fissa pour Netflix. Laure Murat argumente, tempère, justifie, contredit, souvent avec justesse, avec un rien de tempérament et un peu d’humour, permettant ainsi un point de vue plus net au sujet d’auteurs comme Roald Dahl, Ian Fleming ou encore Agatha Christie. Ni pour ni contre, bien au contraire.
©Yann Courtiau 2025
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Courrez donc acheter cet essai de Laure Murat car il s’avère concis et bien utile pour replacer la parole comme la réflexion au-dessus du bruit ambiant qui noie tout débat intelligent au sujet de la récriture (ou pas) de classiques qui sonnent mal à nos contemporaines (et peut-être trop sensibles) oreilles ; après sa rapide et plaisante lecture vous en sortirez bien mieux informé sur cette réécriture au « goût du jour » (goût qui sera dépassé dès le lendemain) mais aussi pourquoi et comment on réécrit aussi pour vendre à nouveau, aux bibliothèques comme aux librairies, des histoires qui, dans leur nouvel emballage, seront adaptées fissa pour Netflix. Laure Murat argumente, tempère, justifie, contredit, souvent avec justesse, avec un rien de tempérament et un peu d’humour, permettant ainsi un point de vue plus net au sujet d’auteurs comme Roald Dahl, Ian Fleming ou encore Agatha Christie. Ni pour ni contre, bien au contraire.
©Yann Courtiau 2025