Librairie

Le Temps d'un Livre

 « Ce qu’est un roman ? avant tout, c’est une quantité de temps. Quand vous voyez un roman dans une librairie, si vous êtes un peu attentif, vous pouvez évaluer immédiatement la quantité de temps qu’il contient. Et cela dans un double sens : le temps qui a été nécessaire à l’auteur pour l’écrire et le temps qu’il faudra pour le lire. » 
- Matéi Visniec, Le Marchand de premières phrases (trad. du roumain par Laure Hinckel)


les conseils de lecture

nos libraires aiment (beaucoup) :

Anne Alombert
Schizophrénie Numérique
(Allia) 90 pages
« Écartelée l’idéologie du progrès technologique et la réalité de la crise écologique, tiraillée entre les promesses du marketing stratégique et les regrets des entrepreneurs repentis, notre époque semble souffrir d’une véritable schizophrénie numérique. »
--
Plus de quarante ans d’éditions et toujours source d’émerveillement, Allia publie ce brillant essai sur la schizophrénie numérique qui semble frapper nos sociétés. Attention : il ne s’agit pas d’un essai qui s’érigerait contre le numérique, mais plutôt d’une invitation à garder un esprit critique et de redéfinir aussi notre rapport à l’innovation et au progrès, car, comme le précise son autrice : « le danger n’est pas dans le progrès d’une superintelligence artificielle, il est dans l’industrialisation des esprits et l’automatisation de l’altérité. » Tout cela est fort intelligent, très lisible, passablement essentiel et hautement recommandé.
©Yann Courtiau 2024
Isabelle Cornaz
La Nuit au pas
(La Baconnière) 80 pages
« La seule chose qui me rassure dans les villes secrètes, inconnues, c’est l’idée que derrière le néant se cache encore la vie, que la carte n’est pas le territoire, que là où l’on croyait qu’il n’y avait rien il y a les hommes. C’est une pensée naïve, car les archipels cachés du monde, la plupart du temps, ce sont des camps où l’on maintient des êtres enfermés. »
--
Journaliste et longtemps correspondante pour la Télévision Suisse Romande en Russie, plus précisément à Moscou, Isabelle Cornaz signe La Nuit au pas, un premier livre personnel, aux confins des genres, un peu autobiographique, proche parfois de l’essai, déployant son vague à l’âme à coup de fragments - prodigue de sa sensibilité aussi. La Nuit au pas est, vous le constaterez vite, d’une grande richesse en miniatures, c’est un livre d’une beauté intranquille, poétique et qui se lit et se relit, lentement. 
©Yann Courtiau 2024
Betrand Schefer
Francesca Woodman
(P.O.L.) 80 pages
"Elle avait suspendu le sens, désactivé les vieilles catégories : portrait, autoportrait, paysage, nu. En s’enfermant, elle avait pulvérisé l’espace photographique : ce n’était pas elle qui disparaissait dans l’image, mais toute la vieille photographie qui se désintégrait entre ses mains. Elle avait trouvé une porte secrète par où entrer à l’intérieur de l’image et arrêter sous nos yeux son processus mortifère d’immobilisation du temps. Toutes ses images ne formaient qu’une seule et même grande photographie en mouvement, qui est un film sans histoire et sans retour, immobile et muet."
--
Voilà un remarquable roman-hommage à la photographe Francesca Woodman, lectrice de Proust, suicidée en 1981 à l’âge de 22 ans, dont on peut dire que l’œuvre est omniprésente (parfois sans qu’on s’en rendre vraiment compte) et se pose dans une certaine filiation avec celle des surréalistes peut-être. On notera la langue : riche. On sera sensible à la phrase aussi : un déploiement lent, une intelligence. On aime le propos : toujours pertinent, souvent émouvant. Magnifique. ©Yann Courtiau 2023
Emmanuel Venet
Contrefeu
(Verdier) 128 pages
« Ainsi, conclut Fernand Furet, «L’Indiscret de Pontorgeuil» pouvait se réjouir de présenter à ses lecteurs, en guise de bouquet final, une anecdote représentative de notre époque. Hélas, dernier numéro oblige, il ne pourrait pas révéler l’issue de ce fait divers à ses abonnés, qu’il saluait chaleureusement et à qui il souhaitait de trouver de nouveaux canaux d’information libre et roborative. »
--
Lire Venet, c’est goûter un style élégant et plein d’intelligence, agrémenté d’un humour tout desprogien. Voici donc la chronique perfide et malicieuse du charme discret de la bourgeoisie de province — si l’on peut dire. Venet multiplie les points de vue, brouille les pistes et révèle les failles de chaque protagoniste avec autant de minutie que de désinvolture. C’est fin, c’est drôle, on serait même tenté de dire que c’est malheureusement si vrai que cela en devient cruel. Et le pire : c’est qu’on aime ça (on en redemande d'ailleurs). 
©Yann Courtiau 2024

Feuille d'information de la librairie Le Temps d'un Livre

Soyez informés de nos activités : rencontres en librairie et conseils de lecture.
Si vous ne recevez pas notre newsletter, regardez dans les "spams". Votre adresse de messagerie est uniquement utilisée pour vous envoyer notre lettre d'information ainsi que des informations concernant nos activités. Vous pouvez à tout moment utiliser le lien de désabonnement intégré dans chacun de nos mails.

Suivez nous sur les réseaux sociaux

Recherche